Production d’énergie, une diversification qui reste payante en agriculture

Quelles sont les motivations des agriculteurs à produire de l’énergie sur la ferme ?
Jean-Marc LISSORGUES : «Les opportunités peuvent être multiples et différentes d’une exploitation à l’autre. Pour certains, il peut y avoir l’intérêt de renouveler une toiture vétuste et de la remplacer par une couverture en bac acier avec des panneaux photovoltaïques.
Pour d’autres, il s’agit d’une diversification des activités de l’exploitation pour sécuriser les revenus ou encore préparer sa retraite.
Enfin, et c’est un schéma que l’on voit se développer de plus en plus sur des élevages (porcins, VL, OL, caprins, volailles…) fortement dépendants de l’énergie pour la ventilation, le chauffage, la fabrication d’aliment à la ferme… C’est la possibilité de produire de l’énergie qui sera auto-consommée et de revendre l’excédent sur le réseau.
Dans tous les cas, une étude en amont est primordiale pour évaluer les gains générés au regard de l’investissement.

Quelles démarches faut-il réaliser au préalable ?
JML : Avant de se lancer, il est nécessaire de connaître le potentiel du projet. Dans le cas du photovoltaïque, il s’agit d’évaluer la surface de toiture qui sera exploitée par la centrale, de regarder la proximité du réseau électrique, l’exposition des toitures avec les éventuels obstacles à l’ensoleillement. Il faut alors se rapprocher d’installateurs spécialisés qui vont réaliser l’étude de faisabilité, déterminer la capacité de production de l’installation et évaluer les différents surcoûts : consolidation des charpentes, travaux de raccordement…
Dès lors, le conseiller d’entreprise du Cerfrance va étudier le projet sous ses différents aspects : la rentabilité économique (dans certains cas, les surcoûts peuvent être tels qu’il n’est pas opportun d’installer une unité de production), la nécessité ou pas de recourir à l’emprunt, le choix du régime fiscal, l’aspect juridique pour les demandes de dérogation dans le cadre de la réglementation des GAEC ou encore pour la structuration juridique de l’activité.

Dans quels cas est-il recommandé de créer une société pour porter l’activité de production d’électricité ?
JML : C’est en fonction de la situation familiale, de la structure de l’entreprise agricole et de l’importance du projet. Il faut savoir que les contrats pour l’énergie photovoltaïque sont de 20 ans. Un jeune exploitant individuel par exemple, peut parfaitement intégrer une petite activité photovoltaïque au sein de son entreprise agricole. En revanche, dans d’autres situations, il est souvent plus opportun de créer une société dédiée, par exemple : si on a 50 ans et que l’on est dans un objectif de complément de retraite. La société permettra d’alléger les flux financiers de l’exploitation (compte-courants, fermage, rémunérations) et facilitera également plus tard la transmission aux enfants. Ou alors, lorsqu’on est plusieurs dans une société de type GAEC, SCEA… il convient d’examiner qui est propriétaire du bâtiment.
Et dans ce cas, bien souvent le portage par une société dédiée sera privilégié. Pour les petits projets de moins de 36kW, une entreprise individuelle suffit. Au-delà, la SAS ou la SARL est plus adaptée.
Il y a aussi des raisons fiscales ; l’Aveyron étant classée en ZRR (Zone de Revitalisation Rurale), cela implique que les nouvelles sociétés créées bénéficient d’une exonération fiscale à l’impôt sur les sociétés pendant 5 ans et d’une dégressivité de l’impôt sur les 3 années suivantes.

Est il aujourd’hui rentable d’investir dans le photovoltaïque ?
JML : Concernant le photovoltaïque, il n’est pas nécessaire d’avoir de compétence particulière. Avec le recul, on se rend compte que les frais d’entretiens-maintenances restent légers, et que la baisse de production au fil des ans n’est pas significative. A la fin des contrats de rachat, l’énergie continuera à être achetée non plus au taux de rachat historique prévu dans le contrat mais au taux du marché en vigueur. Les panneaux continueront de produire, avec peut–être une décroissance du niveau de la production mais généreront encore des revenus.
De plus, l’actualité bouge en permanence ! Lors des premiers projets en 2007, le prix de rachat de l’électricité était élevé mais le prix d’achat des panneaux l’était également.
Aujourd’hui, même si le prix des contrats a fortement baissé, la diminution du prix des panneaux permet de compenser. De plus, depuis le 1er avril 2022, le coût de raccordement au réseau est subventionné à 60% par EDF. Certains projets qui n’étaient pas rentables antérieurement, le deviennent maintenant. Il peut être judicieux de refaire une étude.
A mon sens, la production d’électricité photovoltaïque reste une belle diversification pour l’activité agricole. La rentabilité de ce type de projet est en moyenne située entre 8 et 12%. Les revenus ainsi générés peuvent permettre le développement d’un patrimoine professionnel et privé.

Quel accompagnement Cerfrance peut apporter aux porteurs de projets tout au long du processus ?
JML : Cerfrance peut réaliser l’étude préalable avec le business plan, l’accompagnement juridique à la création de l’activité de production d’énergie, la comptabilité de la société de production et également la gestion et le pilotage des flux financiers. Cerfrance accompagne ainsi le chef d’exploitation sur les choix d’affectation des revenus générés (prélèvements privés, placements, réinvestissements dans de l’immobilier, dans de l’épargne retraite, compléments de revenus pour alléger la société agricole…).
C’est donc du pilotage annuel permanent pendant la vie de la société photovoltaïque.
Chez Cerfrance Aveyron, nous avons fortement encouragé la création de sociétés dédiées à l’énergie. Nous suivons actuellement plus de 350 sociétés dédiées, la quasi-totalité concerne des installations photovoltaïques.»